Blog bière : Lager, ou la bière incomprise
Lager, ou la bière incomprise
Nous avons déjà parlé des types de bière, sur ce blog, et notamment des lagers. Cette fois ci, nous allons entrer un peu plus en détail sur ces bières si spécifiques, trop souvent réduites à la bière industrielle sans saveur.
Une histoire de froid
La lager est un style de bière assez récent, apparu fin 1500 en Bavière. La date est importante car ce style est intimement lié à la découverte du Nouveau Monde et notamment, d’après une étude assez récente, de la découverte de la très froide Patagonie en Argentine. Mais quel est le lien entre la Patagonie et la lager me demanderez-vous.
Pour faire de la bière, il faut que des sortes de champignons (levures pour être plus précis) consomment le sucre d’un jus de céréale. Traditionnellement, on utilise les levures “sauvages” type Brettanomyces et les levures “domestiquées”, la célèbre Saccharomyces Cerevisiae, utilisé aussi bien dans le pain ou le vin que dans la bière.
Hors, en Patagonie vit une levure résistante au froid : la Saccharomyces Eubayanus. Voyageant clandestinement via le bois certainement, notre petite levure trouva son chemin jusque dans les caves à bières bavaroise où elle s’est hybridée avec la Saccharomyces Cerevisiae pour donner la levure Saccharomyces Pastorianus (appelé à une époque S. Carlsbergensis).
Sous ce nom barbare se cache une petite révolution. Cette levure (et d’autres issu d’hybridation et de mutation comme S. Bayanus, ou S. Uvarum) travail lentement, au froid (autour de 10°C). Fragile, elle supporte mal l’alcool au delà de 7 % et produit généralement moins d’ester (molécules aux arômes de fruits). De plus, le fait que la fermentation se passe à une température moindre empêche l’évaporation d’un composé soufré (DMS pour les intimes). Hors, une trop grande quantité de cette molécule donne un côté maïs cuit pas forcément extraordinaire à la bière. De fait, les lagers ont souvent un léger côté soufré, surtout chez les plus légères.
Une fois que la fermentation est terminée, les levures tombent dans le fond de la cuve. Pour toutes ces raisons, on donne aux lagers le nom de “fermentation basse”. Du fait d’une fermentation plus lente, autrefois, les lagers demandaient un stockage au frais de plusieurs mois (de nos jours, quelques semaines). Lager signifiant entrepôt en allemand, il est assez logique que la bière ait pris ce nom.
Mais ce n’est pas en 1500 que la lager deviendra populaire. En effet, excédé par la qualité déplorable de la bière à Pilsen, en Bavière, les brasseurs jettent leurs fûts devant la mairie. Un moine de bavière viendra leur apporter un coup de main en leur apportant leur levure de fermentation basse. C’est en 1842 que la Brasserie des Bourgeois met en place la première “Pils” ou “Pilsen” ou encore “Pilsner”. L’arrivée des verres transparents, montrant la robe brillante et parfaitement limpide des lagers va jouer un grand rôle dans l’appréciation de cette bière. Le succès est immédiat et, en 1859, la brasserie dépose le nom “Pilsner”, et sa marque deviendra “Pilsner Urquell”.
Avec l’invention du réfrigérateur, les lagers peuvent se faire en toutes saisons. Les grands groupes s’en emparent et jusqu’à aujourd’hui, la lager est le style de bière le plus consommé au monde.
Pour résumer, une lager est une bière assez peu fruitée, très ronde et “propre”, avec une mousse abondante, parfois un côté un peu soufré et de longue garde (beaucoup plus longue que les ales).
Les types de lagers les plus répandus :
Les légères en alcool :
- Lager internationale (exemple : Heineken) : La bière la plus consommée au monde, et de loin. Très légère, avec très peu de sucre résiduel, sans arômes prédominant, avec beaucoup de mousse. Alcool : 5 %
- American Lager (exemple : Budweiser) : Très proche des internationales, on retrouve la légèreté, les arômes très discrets et la mousse abondante. Alcool : 5 %
- German Pils (exemple : König Pilsner) : Légère, avec très peu de sucre résiduel, et une amertume présente, une mousse qui tient bien, un côté floral élégant. Une jolie bière de soif. Alcool : 5 %
- Pale Lager Tchèque (exemple : Pilsner Urquell) : Légère, avec un peu plus de matière que les allemandes, mais une amertume toujours présente, et des arômes houblonnés. Alcool : 3.5 %, et 5 % pour les premiums.
- Munich Helles (exemple : Paulaner Original Munichner Hell) : La bière la plus appréciée dans le sud de l’Allemagne. Elle est très pâle, maltée avec une touche d’épices et de fleurs, une amertume suffisante pour contrebalancer sa douceur, et a une finale sèche. Très agréable en bière de soif. Alcool : 5 %
- Pale Kellerbier (exemple : Paulaner Zwickl Naturtrüb) : Il s’agit de la bière des “jardins de la bière” à Munich. Ces “jardins” sont simplement, à l’origine, la terrasse des brasseries allemandes où les consommateurs buvaient sur place la bière. Et puisque les brasseries n’avaient pas l’autorisation de vendre de la nourriture pour éviter de concurrencer les restaurants, les allemands apportent de quoi manger dans ces jardins. Alcool : 5 %
- Vienna (Exemple : La Virgen Pino) : Ambré, elle a un côté malté sur le pain, un peu toasté assez doux, une amertume mesurée, une finale assez sèche. Alcool : 5 %
- Amber Kellerbier (exemple : Hacker-pschorr Münchner kellerbier) : Le style “authentique” de Kellerbier. Souvent légèrement ambré, un malt riche sur les arômes de pain, avec un houblon assez épicé, une bouche plutôt douce et une finale assez sèche. Alcool : 5 %
- Schwarzbier (exemple : Kostritze Schwarzbier) : Brune, avec des arômes rôtis, et toastés, assez légère en bouche et sèche. Alcool : 5 %
- Munich Dunkel (exemple : Franziskaner Dunkel) : Brune, aux arômes profonds et riches de pain, de chocolat. Les arômes ne sont jamais rôtis et la bière jamais astringente, elle reste une bière facile à boire. Alcool : 5 %
Les modérés :
- Maibock ou Helles Bock (exemple : Tijuana Bufadora) : Pâle, malté avec une finale rafraîchissante. Le houblon est un peu plus marqué que dans les autres bocks. Alcool : 7 %
- Festbier (exemple : Weihenstephaner Festbier) : La bière du Oktoberfest ! Tout en douceur, avec un caractère malté et une touche de houblon, elle est relativement puissante tout en restant facile à boire. Alcool : 6 %
- Marzen (exemple : La Virgen Marzen) : Ambré, avec des arômes toastés, de pain grillé et une amertume mesurée. Une finale sèche, riche mais jamais lourde. Alcool : 6 %
- Rauchbier (exemple : Aecht Schlenkerla Rauchbier Marzen) : Proche de la Marzen mais avec un goût fumé plus ou moins prononcé. Alcool : 5.5 %.
Puissante :
- Dunkles Bock (exemple : Cinema Brewer I'll Be Bock) : Brune, elle est puissante, malté avec un côté toasté, sans être douce sur la finale. Alcool : 6.5 %
- Doppelbock (exemple : Weihenstephaner Korbinian) : De blonde à brune, aux arômes très maltés, soit riches et profonds pour les brunes, soit plus houblonnés pour les pâles. Alcool : 8.5 %
- Eisbock (exemple : Schneider Aventinus Eisbock) : Brune, puissante, riche et même avec une viscosité marquée, aux arômes très concentrés. "Eis" signifiant glace, on comprend vite qu'il s'agit d'une bière que l'on a gelée. Retirant la glace formée, on retire du même coup l'eau, concentrant ainsi l'alcool et les arômes dans la bière. Alcool : 11 %
- Baltic Porter (exemple : Brlo Baltic Porter) : Brune, avec une touche de malt et d’arômes rôtis, très complexe et profonde. Le houblon n’est pas prédominant, ni les arômes torréfiés. Alcool : 8 %
Outre toute cette diversité, on trouve de nombreuses autres sortes de lagers. Je ne peux que vous encourager à partir à leur découverte !
Votre serviteur et sommelier, Petit Chapeau Rouge.
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